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Paris - Compte-rendu : Pas de clémence pour la fosse


Même rafraîchie par Joel Lauwers, la mise en scène sans imagination des Herrmann qui a pourtant servie de modèle à toutes les autres "revisitasions" de la Clemenza, sinon celle de Yannis Kokkos, conserve son académisme inoffensif. La direction médiocrissime de Gustav Kuhn accentue encore son ton figé, mais c’est Mozart qu’elle assassine, sourde à la vitalité d’une partition qui prends les habits du seria pour mieux s’en distancier. On sait que Mozart ne fut jamais vraiment dans le son de l’orchestre de l’Opéra de Paris, même lorsque Solti le cravachait, mais parvenir à tant de laideur et de lourdeur laisse sans voix.

Devant ce désastre de la fosse, grevée en surplus par des tempos incertains, les chanteurs font ce qu’ils peuvent : Antonacci reste formidable de présence, la voix un peu moins unie qu’à Genève au printemps dernier, mais ce feu, cet élan, cet italien tranchant où toutes les ambiguïtés de Vitellia transparaissent la classe loin au dessus de ses comparses. Bien chanté, d’un style impeccable, le Sesto de Garancca paraîtra simplement frigide pour ceux qui auront vu la saison passée Susan Graham ou à Genève Joyce DiDonato, Bracht prête son honnête routine habituelle à Publio, Syurina serait charmante en Servilia si sa voix était moins citronnée.

Deux échecs rédhibitoires : l’Annio faux à hurler d’Hannah Esther Minutillo (on espère qu’il ne s’agissait que d’un mauvais jour…) et surtout le Tito de Prégardien, mou et vague dans les récitatifs, avec cette tendance à mâchouiller les voyelles italiennes et à en oublier les consonnes (étrange pour celui qui fut l’un des grands évangélistes de sa génération), totalement dépassé dans les airs qui demandent un aigu de gloire et une virtuosité appuyée sur une phonation parfaite.

Petite reprise, qui finit par faire regretter Sylvain Cambreling. Et hélas, on retrouvera Gustav Kuhn en octobre pour Cosi fan Tutte dans un spectacle pensé par Chéreau avec Daniel Harding et où le chef autrichien fut si terne la saison passée….

Jean-Charles Hoffelé

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Reprise de la Clemenza di Tito, Palais Garnier, le 17 septembre, puis les 22, 25, 28 septembre et le 2 octobre 2006.

Photo d'Elina Garanca (Sesto) et Anna Caterina Antonacci (Vitellia) : Eric MAHOUDEAU/ Opéra national de Paris

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