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Orchestre National et Philharmonique de Radio France - Deux rentrées réussies - Compte-rendu


En direct sur France Musique, les deux orchestres de Radio France ont fait leur rentrée officielle pour le bonheur de ceux qui assistaient à ces concerts. Le Théâtre des Champs-Elysées étant fermé pour travaux jusqu’en novembre, le National s’est contenté d’entamer l’ultime volet de son cycle Gustav Mahler au Châtelet avec Daniele Gatti, tandis que le Philharmonique retrouvait pour sa part le chemin de la salle Pleyel sous la baguette flamboyante du jeune Finlandais Mikko Franck.

La première soirée a prouvé ce que pouvait apporter un travail en profondeur suivi d’une bonne période de repos : abordant la fin de son parcours mahlérien avec la 9e Symphonie, l’Orchestre National a récolté les fruits de sa ténacité et des efforts imposés par son chef et celui-ci a bénéficié de cette longue imprégnation, s’en trouvant comme libéré pour la dernière phase du parcours. Il a maîtrisé et construit sous nos yeux la monstrueuse architecture de près d’une heure et demie où cris et fureur le disputent à un angoissant mysticisme qui se résout dans l’impalpable murmure des archets. Chef et musiciens respiraient dans les mêmes sphères en une envoûtante complicité. Cette interprétation franche où les éclats des cuivres ponctuent le clair-obscur des cordes, atteste des progrès de cette noble phalange.


A en juger par le concert du Philharmonique, ce dernier talonne son aîné de très près ! Il faut dire que même assis, Mikko Franck est un génie de la direction d’orchestre : les gestes des bras sont à la fois précis et lyriques. Ils traduisent, en tout cas, à la perfection pour les musiciens comme pour le public ce que veut le chef. Et il sait ce qu’il veut, comme l’a prouvé une 5e Symphonie de Prokofiev des grands soirs ! Rien n’est improvisé : tout a été réglé par le maestro et accepté par un orchestre qui l’a littéralement ovationné à la fin du concert, pour ne pas dire plébiscité pour succéder à Myung Whun Chung. Espérons que la direction de Radio France saura entendre ses musiciens…


Car ils sont prêts à suivre le fringant Finlandais… jusqu’en enfer à en juger par la tenue de leur jeu dans la première partie de la soirée consacrée, pour des raisons aussi obscures qu’inconnues de nous, à un invraisemblable saucisson d’un certain Edgar Meyer (né en 1960) qui apparaît dans ce Concerto pour violon (sic) comme un épigone hollywoodien de John Adams : c’est le vide sidéral le plus absolu ! Heureusement que la soliste et dédicataire n’est autre que la belle Hilary Hahn qui vous débite l’annuaire du téléphone musical comme s’il s’agissait d’une Sonate de Bach avec les notes les plus enrubannées qui soient… le malheur, comme elle devait le prouver dans son premier bis, c’est qu’elle ne fait pas la différence entre Bach et le susnommé Meyer… Tant pis pour elle !


Aussi bien ne voudra-t-on se souvenir que la 5e Symphonie de Prokofiev, chef-d’œuvre d’orchestration, dont les quatre mouvements ont été mis en fusion par un diablotin venu du froid bondissant de sa chaise pour mieux entraîner ses troupes galvanisées par tant d’enthousiasme et d’intelligence musicale.


Jacques Doucelin


Paris, Châtelet, le 15 septembre et Salle Pleyel, le 16 septembre 2011


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Photo : Kari Kranck

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