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« Musiques au Pays de Pierre Loti » - De riches heures musicales - Compte-rendu


Enfant du pays, le romancier Pierre Loti (1850-1923), officier de marine de son état, auteur de romans exotiques, aimait à se ressourcer sur l’île d’Oléron dans la maison de ses grands-parents maternels et aussi dans un jardin ouvert à la contemplation où désormais il repose. Le jeune chef Julien Masmondet assure la direction artistique de « Musiques au Pays de Pierre Loti », manifestation créée en 2005 - et placée sur la présidence d’honneur de Pierre Bergé - dont les concerts se déroulent dans des sites exceptionnels (Maison de Loti à Rochefort, Île d’Aix, Citadelle du Château d’Oléron…), s’attachant à établir des correspondances entre les arts et la littérature dans l’esprit d’un écrivain qui fut aussi pianiste et chanteur amateur au contact des compositeurs de son temps (Reynaldo Hahn, Gabriel Pierné, Guy Ropartz, Claude Debussy…). Une action pédagogique d’envergure est également conduite auprès des élèves des écoles primaires de la région que Julien Masmondet se charge se sensibiliser à la musique avec un bel enthousiasme.

Pianiste invité, François Dumont consacre son récital dans l’église Saint-Georges à la Valse dans tous ses états autour de Schubert, Brahms, Chopin, Hahn, Debussy, Ravel. En dépit d’une acoustique assez réverbérée, le soliste réussit le tour de force de captiver par une sonorité qui sait s’adapter aussi bien à la légèreté schubertienne (Valses op 9) qu’à la densité brahmsienne (Valses op 39) ou à l’élégance chopinienne (Grande Valse brillante op 18). Son jeu engagé et poétique convient aussi bien à la subtilité des Valses de Reynaldo Hahn, parfois proches des Gymnopédies de Satie, qu’à l’étrangeté de La Plus que lente de Debussy ou à la virtuosité époustouflante de ValseRavel. Le bis, Clair de lune de Debussy, est un véritable rêve éveillé.

Accompagnée au clavier avec délicatesse et intelligence par Vincent Leterme, la mezzo-soprano Sophie Fournier(photo) propose à la Citadelle d’Oléron un florilège de mélodies de Poulenc, Debussy, Ravel et Lalanne, ponctué par la lecture de lettres très suggestives échangées entre Francis Poulenc, Denise Duval ou Jean Cocteau. La cantatrice consacre la seconde partie de son évocation de Denise Duval à l’exécution de La Voix humaine de Francis Poulenc (1958). Disciple de Régine Crespin, Sophie Fournier sait s’identifier théâtralement au personnage bouleversant du monologue de Jean Cocteau, dans une mise en scène minimaliste d’une grande intensité. Diction parfaite, projection assurée caractérisent une interprétation marquée non seulement du sceau de la tradition mais aussi de la charge émotionnelle la plus vibrante. Un moment de passion partagé avec un public conscient de vivre des instants magiques à l’image de ce festival généreux et de qualité, à mille lieux de tous les effets d’annonce.

Michel Le Naour

Eglise Saint-Georges et Citadelle du château, Oléron, 2 et 3 juin 2011

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Photo : DR

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