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La Traviata à l’Opéra de Nantes - Verdi chez Freud - Compte-rendu

La Traviata présentée à l’Opéra de Nantes ne tombe pas dans les clichés des mises en scène historiquement datées. Le plateau est plongé, la plupart du temps, dans une atmosphère sombre d’où seuls se dégagent – dans un décor dépouillé signé Barbara de Limburg –, un lit d’amour ou de souffrance, des haies de camélias mobiles. Emmanuelle Bastet n’a pas choisi la facilité en proposant une vision à forte connotation psychanalytique mêlant sexe et passion, symboles connotés (l’armoire d’escarpins), illusions, mensonges et vérité intérieure. Dès le lever de rideau l’issue fatale est annoncée ; tout ce qui s’ensuit prend la forme d’une course à l’abîme où le drame est vécu comme une libération sacrificielle.

Emouvante, la jeune Roumaine Mirella Bunoaica donne à Violetta une allure de femme-enfant, éloignée de la traditionnelle dévoyée ; l’expérience lui permettra de mieux cerner son personnage et de le peaufiner sur le plan vocal. Le Lituanien Edgaras Montvidas (Alfredo) déploie chaleur et virile vigueur. Sa voix tendue manque un peu d’ombre et de lumière, mais il assume les états d’âme du héros avec franchise et juvénilité.

Dans le rôle de Germont, le baryton Tassis Christoyannis campe un père noble à la ligne de chant assurée et contrôlée ; s’il se montre au départ un peu brutal dans ses attaques, son timbre s’adoucit au fil du drame. Les rôles secondaires sont excellemment tenus, à l’image de la Flora de Leah-Marian Jones, de l’Annina de Cécile Galois, du baron Douphol de Laurent Alvaro et du docteur Grenvil de Frédéric Caton. L’Orchestre National des Pays de la Loire est mené avec lyrisme, flamme et tension par Roberto Rizzi Brignoli, capable de toutes les nuances et de tous les contrastes. Le maestro italien démontre une nouvelle fois sa compréhension du langage verdien grâce à une direction fébrile, experte et fidèle aux intentions du compositeur. Par son engagement, il dynamise des musiciens attentifs au moindre de ses gestes et donne du corps à une représentation qui a charmé le public nantais.

Michel Le Naour

Verdi : La Traviata - Nantes, Théâtre Graslin, 28 mai, prochaines représentations : Nantes, Théâtre Graslin le 5 juin.
Angers (Le Quai), les 16 et 18 juin 2013.

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Photo : Jeff Robillon
 

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