Joseph Haydn se devait de répondre aux sollicitations du prince Esterhazy et ses huit opéras correspondent à des commandes de son employeur. Ainsi composa-t-il à partir d’un livret de Goldoni Il Mondo della luna, dont la création se tint à Esterhaza, le 3 août 1777 avec le castrat Pietro Gherardi dans le rôle d’Ernesto.

L’Atelier lyrique de l’Opéra de Paris propose de ce dramma giocoso une vision actualisée, véritable régal de fantaisie d’où se dégage un sentiment doux-amer. La mise en scène très réussie de David Lescot, inspirée de l’univers du film « Affreux, sales et méchants » d’Ettore Scola, nous transporte de la terre à la lune dans un décor interchangeable de terrain vague au réalisme suggestif. Détritus, pneus usagés, roulotte hors d’âge, peuplent ce no man’s land où s’affairent des personnages dignes de la commedia dell’arte.

La complicité dont font preuve les chanteurs et leur jubilation toute juvénile sont un pur bonheur pour le spectateur. En Buonafede, le baryton Tiago Matos, voix malléable et bien placée, campe un père ombrageux et naïf. Ses filles Clarice et Flaminia (Andrea Soare, Olga Seliverstova), sa servante Lisetta (Anna Pennisi), fines mouches, ne sont jamais à cours de stratagèmes pour parvenir à leurs fins. Les amoureux comploteurs Ecclitico (Oleksiy Palchykov), Ernesto (Eva Zaïcik) et Cecco (Kévin Amiel), participent avec entrain à une intrigue bien ficelée qui fait aussi place à la féérie et à l’onirisme.

Maître d’œuvre de cette réussite, Guillaume Tourniaire à la tête de l’Orchestre-Atelier Ostinato donne toute sa saveur à la partition de Haydn, malgré l’acoustique trop sèche de la salle de la MC 93. Cette production inventive où l’esprit fuse sans cesse témoigne du travail en profondeur réalisé avec de jeunes artistes qui font plaisir à voir et à entendre dans un ouvrage débordant de vie et de surprises.

Encore deux représentations les 26 et 28 juin : ne les manquez pas !

Michel Le Naour

Haydn : Il Mondo della Luna - Bobigny, MC 93, 22 juin, prochaines représentations les 26 et 28 juin 2013.

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Photo : Opéra de Paris/Mirco Magliocca