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​Cycle Sibelius de l'Orchestre philharmonique de Radio France sous la direction de Mikko Franck – Dans son arbre généalogique – Compte-rendu

 

En guise presque de série de concerts d’adieu, Mikko Franck livre une intégrale des symphonies de Sibelius à la tête de l’Orchestre philharmonique de Radio France dont il quittera la direction à l’été 2025. Une manière de récapitulation pour celui qui s’était déjà attaqué avec son orchestre à chacune des symphonies au cours des années précédentes. Puisque l'auteur de Kullervo figure depuis ses tout premiers essais au répertoire du chef (dont son premier disque en 1999, à l’âge de 20 ans)(1), comme de juste pour un Finlandais.
 
La forme symphonique, projet de toute une vie créatrice et part essentielle de Sibelius, avec sept symphonies (et une Huitième laissée en suspens), le consacre comme l’un des grands maîtres du genre. Longtemps délaissé en France, ce répertoire y a trouvé sa place depuis quelques années. Mikko Franck est ici à son affaire, qui démontre d’abondance son talent en la matière. 
 

© Dimitri Scapolan 
 
Après un premier concert réunissant les deux premières symphonies, place le jour d’après aux deux suivantes, entrecoupées du célèbre Concerto pour violon. La parcimonieuse puis dégagée d’un grand souffle Troisième Symphonie retrouve ses accents démesurés avec un orchestre pointilliste et une direction ardemment méticuleuse. L’envoûtant Concerto recèle en Hilary Hahn une soliste prédestinée qui possède entièrement cette œuvre qu’elle a à son office régulier. Justesse, qualité du phrasé, égalité du son à travers ses évolutions, la violoniste américaine régale l’auditoire, bien secondée par un orchestre en parfaite symbiose. Tout juste peut-on regretter un bis (réclamé par un public trépident) superfétatoire ; un Bach assez incongru dans ce contexte sibélien. Après l’entracte, la prophétique Quatrième Symphonie renoue avec ferveur son caractère tumultueux qui la signale comme une page hors normes.
 

© Dimitri Scapolan
 
La dernière soirée du cycle à l’Auditorium de la Maison ronde, s’envole et éclate en apothéose du monde minéral et organique à nul autre pareil de Sibelius avec les trois dernières symphonies. La grandeur de la Cinquième s’épanche fougueuse, tandis que la secrète Sixième s’insinue subtilement et que la Septième, en un seul mouvement, vibre insaisissable dans l’expansion inexorable de ce sommet insurpassé. Le Philhar, investi comme rarement, répond d’une seule voix, cordes et vents mêlés, aux ordres impétueux d’un Mikko Franck d’un total engagement. Grand projet et grand moment dans son aboutissement.
 
Pierre-René Serna
 

(1) Suite de Lemminkäinen & En Saga, avec l’Orchestre symphonique de la Radio Suédoise (Ondine ODE 953-2)

Paris, Auditorium de Radio France, 11 et 12 avril 2024.

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Photo © Dimitri Scapolan

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