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Compte-rendu : La Cendrillon de Laruette retrouvée - Il était une fois l'opéra-comique


Cette Cendrillon de Jean-Louis Laruette, créée en 1759, est fille de notre XVIIIe siècle, quand aux fastes baroques de Rameau succèdent les prémices du classicisme. Un joli divertissement y est à l'oeuvre, qui mêle airs d'opéras à la mode et chants populaires de vaudeville propices aux jeux de mots, aux double-sens, aux effets bouffes. Né en 1731, Laruette fut un ténor sans grande envergure, mais en revanche un excellent acteur compensant des moyens vocaux limités par un jeu expressif très affûté. Attiré par les rôles comiques ou parodiques, il s'y tailla un franc succès, sans cesser de composer pour la scène (une douzaine d'ouvrages dont la Cendrillon qui nous occupe).

De surcroît, claveciniste de talent et fin lettré, notre musicien sut faire valoir d'autres atouts. Mais une santé fragile mettra fin prématurément à sa carrière d'auteur en 1779. Ce qui n'enlève rien au rôle très positif qu'il a joué dans la carrière de l'opéra-comique, où, avec son ami Duni, il fut une manière de précurseur montrant la voie à Monsigny et Philidor dans la fusion de la musique et du texte.

Reste que remonter Cendrillon aujourd'hui est une opération qui n'est pas sans risque. Il y faut, nous disent Hélène Clerc-Murgier et Pauline Warnier, responsables de la reconstitution, une vraie complicité avec la sensibilité baroque, en phase avec l'espace de liberté et de création suggéré par le genre, outre la part d'incertitude relative à la relecture des vaudevilles. En effet, la seule indication nous est donnée par le livret et le titre des mélodies, dont il faut retrouver la trace dans les recueils d'airs de l'époque.

Précisément, c'est ce souci de crédibilité qui caractérise l'exhumation proposée à l'Opéra Comique par le jeune ensemble les Monts du Reuil. Un travail certes perfectible (dans le jeu instrumental en particulier), mais privilégiant l'esprit ludique, par le biais d'une scénographie juste de gestes et d'attitudes et d'un sobre décor orientalisant aux effets de lanterne magique, espace convivial où le concert vocal est à l'aise (on distinguera la Cendrillon joliment dramatique d'Eve Coquart (photo) et le Prince toujours stylé de Benjamin Alunni). De toute façon, cette Cendrillon sera de retour, dans les mois qui viennent, aux Festivals de Pontoise et de Château-Thierry, entre autres. Que les amoureux des vaudevilles de la Foire Saint-Germain se le disent !

Roger Tellart

J.L. Laruette : Cendrillon – Paris, Opéra Comique, 14 mars 2011

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Photo : DR

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