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Compte-rendu Art vocal - La Calisto au Théâtre des Champs-Elysées

Des décors assez laids, même vus sous l’angle naïf ou humoristique (l’avion phaéton, crashé évidemment), des costumes itou (au sommet des Furies habillées par les surplus de Bergère de France), un spectacle entièrement morne là où Faustini a mis un théâtre si contrasté, passant en un instant de l’élégiaque au salace. Décidément cette Calisto ne laissera aucun souvenir de scène : Macha Makeieff fait ce qu’il faut pour cela, produisant une lecture terne qui ne saisit jamais les enjeux du livret, mais s’encombre de bruitages inutiles qui polluent la soirée. Christophe Rousset est à son diapason, débitant la partition d’un seul geste, univoque, ennuyeux, plat, guère aidé par un ensemble réduit qui ne peut rendre l’imagination flamboyante et sensuelle de Cavalli. Dommage qu’il n’ait pas ici faite siennes les démonstrations de René Jacobs.

Mais malgré ces deux handicaps majeurs, on a bien entendu l’œuvre, mieux qu’à la Monnaie. Une distribution immaculée, fruit probablement autant de Dominique Meyer, en partance pour l’opéra de Vienne, que de Christophe Rousset, imposait à elle seule autant de visages que de destins. Sophie Karthäuser est la plus lumineuse des Calisto, étoile par la voix avant même sa métamorphose, vierge troublée par les lèvres de cette fausse Diane de Jupiter, un formidable Giovanni Battista Parodi qui ose et assume le fausset. Magistrale Junon, furieuse et noble, avec une amertume empoisonnée jusque dans la voix, selon Véronique Gens, admirable de tenue physique et vocale. Tendre Endimione de Lawrence Zazzo, plus astronome que berger, le seul pour lequel Christophe Rousset semble montrer un peu d’attention. On est heureux que l’instrument si noble de Marie-Claude Chappuis se développe aussi généreusement, sa Diane ambrée, fine, sensuellement modelée était stupéfiante. Les utilités avaient toutes de forts visages : le Pan expressionniste de Cyril Auvity remettait un peu de vrai théâtre vénitien dans cette scène vide, le Mercure alerte et idéalement ironique de Mario Cassi, la Linfea très travaillée par la question du sexe du grave mezzo de Milena Sorti, l’adorable Satirino de Sabina Puértolas, le virulent Satirino de Graeme Broadbent, tous animaient la scène d’abord par le chant.

Le spectacle incomparable de Wernicke peut dormir sur ses deux oreilles, mais si la Monnaie le reprend à nouveau, elle ferait bien d’aller chercher ici ses chanteurs.

Jean-Charles Hoffelé

Cavalli : La Calisto - Paris,Théâtre des Champs-Elysées, le 11 mai 2010.

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Photo : Alvaro Yanez
 

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