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Ballet de l’Opéra de Vienne aux Etés de la Danse (II) - Montée en puissance - Compte-rendu

Avec ce deuxième programme, on a pu découvrir un magnifique diaporama des facettes de cette compagnie à surprise, qui non seulement avance des individualités frappantes, mais possède un répertoire d’une riche diversité. On l’avait pressenti avec le premier programme, plus ingrat dans sa composition même s’il comportait des instants miraculeux, notamment le Bach Suite III de John Neumeier, sans doute parfaitement répété (avec notamment le coup d’œil du maître lui-même), ou le très joli pas de deux de la Chauve-Souris de Roland Petit. Mais on y avait été gêné par une disparité dans les soli, les danseurs n’ayant pas encore fusionné en une identité commune. Il est vrai que des pas de deux d’école, façon Le Corsaire, ne mettent pas forcément les danseurs en valeur, sauf s’ils sont des virtuoses d’exception.

Ici, une toute autre teneur dans ce programme montrant quatre chorégraphes du moment, dont l’écriture postclassique, tout en utilisant idéalement les ressources de souplesse et les beaux placés des danseurs, les mettait incontestablement mieux en valeur. Délicatesse, fluidité ont marqué les chorégraphies de David Dawson, A million kisses to my Skin, sur Bach et d’Helen Pickett, avec le très vitaminé Eventide, sur des pièces répétitives de diverses provenances: tous y étaient excellents, de l’élégante et intense Olga Esina à Maria Yakovleva ou Roman Lazik, et une nouvelle fois la largeur des mouvements et la perfection de l’axe ont ébloui chez Masayu Komoto.

Plus complexe fut la perception de Windspiele, de Patrick de Bana, chorégraphe très présent au Ballet de Vienne. On y ressentait une très belle ambition spirituelle, portée par le Concerto pour violon de Tchaïkovski, un lyrisme exacerbé, dans une indéniable mouvance béjartienne, car de Bana fut l’un de ses grands danseurs. On en retient des instants fulgurants notamment lorsque le grand Kirill Kouriaev, dans de larges flottants dessinés par Agnès Letestu, bondissait et tourbillonnait comme dans une transe dionysiaque. Quel admirable danseur !

Enfin, place, et gloire au français Jean-Christophe Maillot, dont l’écriture est la plus typée, avec une graphie et un rythme tendus et nerveux qui portent sa griffe acérée et poétique à la fois. Sur Fearful Symmetries de John Adams, ce Vers un Pays sage, créé en 1995, a tenu en haleine pendant une demi-heure, renouvelant son énergie de l’intérieur comme la musique, et enlevé par des danseurs totalement habités. Une très belle réussite pour Manuel Legris, directeur de la troupe, que d’avoir ainsi brossé un portrait de sa compagnie et opéré des choix aussi judicieux.

Jacqueline Thuilleux

Les Etés de la Danse - Paris, Théâtre du Châtelet, le 10 juillet, prochaines représentations les 8, 9, 10, 11, 12, 13 (15h et 20h), 15, 16, 17, 18, 19, 20 (15h et 20h), 22, 23, 24, 25, 26, 27 (15h et 20h) juillet 2013

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Photo : DR
 

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