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Vienne, Autriche - Compte-rendu - Une leçon de musique de chambre


Pour ce concert de musique de chambre, le public viennois était venu nombreux écouter un programme inhabituel où le Trio en ré majeur op 70 n°1 « Trio des esprits » de Beethoven voisinait avec le Quatuor pour la fin du temps d’Olivier Messiaen. Maître d’œuvre de ce concert, le jeune chef d’orchestre Philippe Jordan (photo), redevenu pour l’occasion pianiste, côtoyait des solistes de l’Orchestre Philharmonique de Vienne : le violoniste Rainer Kuchl, le violoncelliste Franz Bartolomey et le clarinettiste Ernst Ottensamer.

Dans l’écrin idéal de la Brahmssaal, les interprètes, en parfaite connivence, donnent du « Trio des Esprits » une vision d’un bel équilibre où chaque protagoniste sait converser mais aussi s’affronter le cas échéant. Le violon somptueux et fin de Rainer Kuchl et le violoncelle généreux de Franz Bartolomey répondent aux impulsions du piano de Philippe Jordan qui se montre tantôt mozartien de ton, coloriste subtil (Largo assai ed espressivo), tantôt narrateur dans les échanges où le rythme (Presto) le dispute aux climats harmoniques (Allegro vivace con brio).

En seconde partie, même bonheur partagé avec une lecture très expressive du Quatuor pour la fin de Temps de Messiaen : clarinette virtuose (Abîme des oiseaux), violoncelle vibrant (Louange à l’Eternité de Jésus), violon presque expressionniste (Louange à l’Immortalité de Jésus), piano orchestral (Danse de la fureur pour les sept trompettes) et engagement total de quatre musiciens qui s’investissent sans compter dans cette partition complexe. Peut-être une conception plus proche de l’angoisse que de l’espoir mais tellement aboutie qu’elle convainc pleinement. Silence religieux du public aux anges, puis applaudissements à tout rompre !

Michel Le Naour

Vienne, Musikverein, Salle Brahms, 7 décembre 2008

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