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Richard Goode au Théâtre des Champs-Elysées – Une ascétique noblesse – Compte-rendu

Invité des Concerts du Dimanche matin, Richard Goode (photo) – un disciple de Rudolf Serkin auquel il succéda comme Directeur du Festival de Marlboro –, reconnu outre-Atlantique en particulier pour son enregistrement des 32 Sonates de Beethoven, ne jouit pas une reconnaissance digne de son talent en France. Il occupe pourtant, à 75 ans, une place de premier plan dans le monde musical.
 
Dans la Sonate de Berg, l'artiste américain s’attache, non sans ascétisme, à clarifier le discours avec une pleine maîtrise des fluctuations de tempo et de la structure d'une œuvre un seul mouvement. Si la recherche de la forme l’emporte parfois sur l’attention portée à la couleur, la progression savamment conduite rend bien compte de la complexité de l'unique composition pour piano seul de l'artiste viennois. L’approche naturelle de la Sonate op. 101 de Beethoven, d’une belle intériorité, ne cherche pas à plaire, mais, sous des doigts sûrs, ce clavier en noir et blanc privilégie l’unité de l’architecture avec une vraie noblesse de ton.
 
Un peu distant mais d’une réelle hauteur de vue dans le florilège de pièces de Chopin (deux nocturnes, quatre mazurkas, Ballade n°3, Barcarolle), Richard Goode se refuse à nouveau à toute extraversion mais sait finement ciseler la ligne sinueuse de la phrase (Nocturne op. 62 n°1) et soutenir élégamment le rythme des mazurkas. Stylistiquement parfaite, la Ballade n°3 se révèle un peu courte de souffle, et la Barcarolle, toujours narrative, chemine sans frémissement excessif jusqu’à l’apothéose finale. Un artiste profond, peu enclin à la démonstration et qui mérite le respect.
 
Michel Le Naour

Paris, Théâtre des Champs-Elysées, 27 janvier 2019

Photo © Steve Riskind

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