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Paris - Compte-rendu : Promenade musicale au musée du Louvre


Après Robert Badinter, Toni Morrison et Anselm Kiefer les années précédentes, le Musée du Louvre ouvre ses portes à Pierre Boulez. L’exposition qui lui est consacrée jusqu’au 9 février, la conférence inaugurale qu’il a prononcée le 6 novembre dernier, les concerts proposés jusqu’au 2 décembre tournent tous autour de la thématique de l’œuvre comme fragment.

Le premier concert, parcours musical à travers quelques salles du musée, était offert par le compositeur et chef d’orchestre à quatre jeunes compositeurs et aux jeunes musiciens de la Lucerne Festival Academy. Quatre œuvres donc étaient proposées en première audition française, après avoir été créées en septembre dernier à l’occasion du festival de Lucerne, confrontées chacune à une page d’un large répertoire (de la Renaissance au XXe siècle) et à l’environnement d’une salle du musée.

Point de départ de ce « concert-promenade », la galerie Daru, prolongée par l’escalier menant à la Victoire de Samothrace se prêtait à une exploration acoustique, menée avec beaucoup de réussite par le Tchèque Ondrej Adámek, né en 1979. Coups d’ailes pour octuor de cuivres, repose largement sur un jeu d’opposition entre immobilité et mouvement. L’enchaînement rapide des notes, en spirales ascendantes énoncées dès l’abord de l’œuvre par les trompettes, se fond progressivement aux notes tenues et aux glissandos des cors et trombones. Lui manque cependant quelque assise harmonique dans les graves, comme le montrait par contraste l’interprétation par les mêmes jeunes musiciens d’une Canzone de Giovanni Gabrieli.

Après une courte déambulation, le salon Mollien accueillait la violoniste britannique Nathalie Shaw. Dans le chatoiement de couleurs des Femmes d’Alger de Delacroix et des multiples variations auxquelles les a soumises Picasso, elle a délivré une interprétation limpide, à la fois puissamment évocatrice et mesurée, de la Melodia, troisième mouvement de la Sonate pour violon seul de Bartók. Anima foglia, la pièce de Jérôme Combier, né en 1971, très aérienne, semble approfondir le discours du compositeur hongrois, en textures frémissantes et intenses où le compositeur – et son interprète – témoignent d’une parfaite maîtrise du timbre.


Mis en regard de La Joconde et de Mozart, l’Allemand Johannes Fischer s’est tiré de cette intimidante gageure en proposant, avec Dans le cadre – mozart mobile, d’intégrer à sa pièce l’Adagio pour deux clarinettes et trois cors de basset K. 411, dont elle est le prolongement. Le passage d’une œuvre à l’autre se fait par un jeu de balancements et d’hésitations rappelant le traitement que Berio avait appliqué à Schubert dans Rendering. La dernière étape du concert, au pied d’un chef-d’œuvre du baroque espagnol, voyait la percussionniste Laurence Meisterlin interpréter deux œuvres pour marimba solo. Dans Mari (1990) de Franco Donatoni (1927-2000) s’opère, en une forme rondo caractéristique du compositeur, la transformation progressive et jubilatoire du matériau sonore. Plus brève, la pièce écrite par Johannes Boris Borowski, âgé de 29 ans, en reprend quelques intentions rythmiques mais s’attache avant tout à une étude de timbres.

Jean-Guillaume Lebrun

Paris, Musée du Louvre, 11 novembre 2008

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Photo : DR

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