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Paris - Compte-rendu - Pour Déjanire. Reprise au Palais Garnier de l’Hercules de Haendel donné à Aix-en-Provence

Bienvenu dans le palais bunker d’Hercules, Peduzzi a pensé un décor de brute pour une brute : William Shimel excelle dans la psychologie de petit pois du héros. N’empêche, durant trois heures de spectacle, ce mur de béton ennuie profondément, et ce n’est pas la mise en scène sommaire de Luc Bondy qui réveillera l’auditeur, ni la direction sans caractère, mais amène, confortable, au mieux jolie, de William Christie. Tout cela vous a musicalement un petit air régence qui n’a strictement rien à voir avec la puissance du drame hændélien.

Quoi ? Après Gardiner, après Minkowski, diriger un tel chef d’œuvre comme l’on ouvre un robinet d’eau tiède ? Et laisser ses chanteurs nus, sans soutien, livrés à leur seul génie ? Il est vrai que depuis sa miraculeuse Theodora (oui, mais Sellars était là, ceci explique peut-être cela) Christie s’est depuis beaucoup cherché dans Haendel sans jamais se trouver. Le craquant Toby Spence a depuis Aix raffiné son Hyllus, même si la vocalise est toujours indurée : on lui doit bien des moments d’émotion du spectacle. Iole est sous distribuée à une Ingela Bohlin anecdotique même si son air du III, aux pianissimos diaprés, fut touchant.

La tessiture de Lichas est trop basse pour Malena Ernman et sa projection s’en trouve raccourcie. C’est à elle que revient l’honneur de sortir d’un fût de dioxine façon Seveso, à l’aide de deux bâtons, la Tunique de Nessus, idée ridicule mais qui ne fait pas rire. Reste la Dejanire géniale de Joyce DiDonato, comédienne inspirée, chanteuse impeccable, dont le registre expressif déclinait tous les états de la jalousie. Pour l’anecdote, son air du II, au plus doux de son pianissimo fut pollué par la sonnerie d’un téléphone portable qui entonna l’ouverture de Carmen, ce qui valu à sa propriétaire les ires publiques de William Christie.

Avant le troisième acte, une voix off demandait : « par respect pour les artistes nous vous demandons de vos assurer que vos téléphones portables sont bien éteints ». On aurait préféré « par égard pour Haendel ».

Jean-Charles Hoffelé

Palais Garnier, le 5 décembre 2004, et les 8, 11, 14, 16, 19, 22, 24 et 27 décembre.

Photo: Eric Mahoudeau
 

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