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Ouverture du festival ManiFeste au Centre Pompidou - Tellurismes et volutes - Compte-rendu

L’Ircam fête ses 40 ans et son festival ManiFeste s’en fait le reflet, qui ouvre par un concert dédié à Alberto Posadas, compositeur d’à peine plus de 40 ans (né en 1967) au vent en poupe. Se succèdent ainsi : La Lumière du noir, datée de 2010, œuvre chargée et convulsive pour formation orchestrale, en hommage au peintre Pierre Soulage ; six motets extraits des Tenebrae Responsories (Répons de la Semaine sainte) pour chœur a cappella de Tomás Luis de Victoria, musicien de la Renaissance espagnole dont Posadas revendique l’héritage ; notamment pour la dernière pièce du concert : Tenebrae (2012-2013), pour voix, ensemble instrumental et électronique, d’une couleur tellurique, profonde, un rien torturée, à la fois incantatoire et spectaculaire (spectrale ?), où l’on sent le disciple de ce compositeur de génie que fut Francisco Guerrero (1951-1997, dont Pascal Dusapin a pu dire : « Je n’aime pas Guerrero, je l’admire ! »). De Victoria à Posadas, près de cinq siècles d’histoire musicale, dont l’Ircam à sa manière peut se revendiquer.
 

Alberto Posadas © DR

Sous la battue distillée autant que pointilleuse de Duncan Ward (photo), l’Ensemble Intercontemporain crépite d’un bel ensemble, soutenu efficacement, pour Tenebrae, par la réalisation informatique musicale Ircam en temps réel de Tomas Goepfer. Le groupe vocal Exaudi officie de huit voix dans Victoria, à travers ses volutes suspendues sous la direction de James Weeks, puis de six voix bien en place et bien traitées électroniquement pour l’œuvre éponyme de Posadas (sur des textes liturgiques en latin, mais aussi de Novalis, Stefan George et Rilke en allemand). Une belle entrée en matière d’un festival qui sait faire la part de l’instrumental, du vocal, du traitement électroacoustique, comme de la tradition et de la dernière modernité.
 
Pour clore la soirée, après ce concert dans la grande salle du Centre Pompidou, le parvis s’offre en plein-air à un spectacle en création : Piazza, conjuguant jeux de vapeurs descendus de la façade du centre d’art contemporain (dus à Fujiko Nakaya, « sculptrice de brouillard »), composition, arrangement et performance (dus à KTL de Stephen O’Malley et Peter Rehberg), appoint de cors des Alpes (par l’ensemble Alponom) et spatialisation sonore Ircam (conçue par Manuel Poletti). Afin de finir sur une note vaporeuse autant qu’envoûtante.

 
Pierre-René Serna
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Paris, Grande salle du Centre Pompidou, Place Georges-Pompidou, 2 juin 2017
 
Festival ManiFeste, du 1er juin au 1er juillet :
manifeste.ircam.fr/
 
Site de Duncan Ward : www.duncan-ward.co.uk/

Photo Duncan Ward © Maurice Foxall

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