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Mezzo d’avenir - Une interview de Marianne Crébassa

Révélée grâce à la curiosité de René Koering et d’Hervé Niquet, la mezzo Marianne Crébassa est déjà connue des amateurs d’art lyrique attentifs à la nouvelle génération. « Révélation Classique Adami » 2011, le jeune artiste est membre de l’Atelier lyrique de l’Opéra de Paris depuis la saison dernière et participe en ce moment à la reprise de Lulu à l’Opéra Bastille. Questions à une interprète qui mêle le talent à la simplicité et dont vous entendrez beaucoup parler dans les années à venir.

Dans quelles circonstances vous êtes vous retrouvée sur la scène de l’Opéra de Montpellier en 2008 pour le Manfred de Schumann

Marianne Crebassa : C’est René Koering qui m’a donné cette chance. J’étais à l’époque étudiante en musicologie, piano et chant. Un des professeurs du Conservatoire de Montpellier nous a un jour annoncé que René Koering et Hervé Niquet organisaient une audition pour le Manfred de Schumann. R. Koering s’était laissé convaincre par H. Niquet d’auditionner des chanteuses de la région de Montpellier. Nous avons été prévenues un peu au dernier moment ; j’ai eu la partition la veille seulement. Je n’étais pas très rassurée, mais j’y suis tout de même allée et j’ai vu tout de suite que quelque chose d’assez étrange se passait ; on me posait beaucoup de questions. J’ai donc été engagée pour ce Manfred et, quelques mois plus tard, R. Koering m’a proposé de participer pour un petit rôle à Fedra de Pizzetti dans le cadre du Festival de Radio France. J’ai été réinvitée l’année suivante. Au fil du temps, je progressais et l’on me confiait des emplois de plus en plus importants, tel le rôle-titre de La Magicienne de Halévy en juillet dernier.

Quels sont les professeurs ou les interprètes qui vous ont marquée durant vos études ?

M. C. : Si j’en suis là aujourd’hui, c’est grâce au professeur que j’ai rencontré au Conservatoire Montpellier, le contre-ténor Nicolas Domingues. Nous avons travaillé ensemble dès le départ et je n’ai pas éprouvé le besoin de chercher d’autres professeurs car ça fonctionnait très bien entre nous.
Parmi les interprètes, j’éprouve beaucoup d’admiration pour Montserrat Caballé, la diversité des rôles qu’elle a abordés, son parcours, sa technique. Même si nous n’avons pas le même type de voix, elle représente une sorte de but à atteindre

Et parmi les mezzos ?

M. C. : … Christa Ludwig.

Avez-vous eu l’occasion de la rencontrer, de travailler avec elle ?

M. C. : Non, mais j’aimerais bien…

Vous débutez votre deuxième saison à l’Atelier lyrique de l’Opéra de Paris. Comment les choses se déroulent-elles dans cette institution qui vous offre pas mal d’occasions de vous faire entendre ?

M. C. : En effet. C’est extraordinaire car on est tout de suite mis sur le devant de la scène, on est complètement immergé dans le monde de l’Opéra. Je travaille tous les jours à la Bastille, au contact de professionnels du chant, de chefs de chant spécialisés dans beaucoup de répertoires. Mais on est aussi au contact de la vie de l’Opéra, de tous les corps de métier. Il est passionnant de découvrir comme se prépare une production.
L’Atelier lyrique constitue aussi une expérience humaine très enrichissante. Nous sommes un peu comme une troupe ; nous sommes ensemble tous les jours et en production très souvent. C’est un endroit où l’on peut s’épanouir, continuer le travail, avec plus de soutien que lorsque l’on est lâché dans la vie professionnelle.

Par rapport à ce que vous aviez étudié, chanté auparavant, l’entrée à l’Atelier lyrique vous a-t-elle conduite à certaines remises en question ?

M. C. : J’ai eu le sentiment de continuer à avancer ; le rythme de travail est tellement soutenu que l’on est obligé d’avancer. Il y a une masse considérable d’informations à assimiler. Sur le plan technique on est évidemment amené à retravailler certaines choses car, les difficultés que l’on pouvait éprouver sur tel ou tel point auparavant s’exacerbent forcément avec une telle activité quotidienne. Mais ces remises en question n’ont à mon sens d’autre but que de permettre d’avancer, de progresser.

La reprise de Lulu à la Bastille vous donne l’occasion d’y tenir un petit rôle (Die Kunstgewerblerin). Comment se passe, de votre point de vue, la préparation de ce spectacle ?

M. C. : Finalement, ces « petits rôles » ne sont pas si petits que ça. Nous sommes des maillons d’une chaîne dans l’écriture musicale, nous avons beaucoup d’ensembles ; cela exige de la rigueur. Avec ce genre de musique, on se dont d’être très précis sur le plan rythmique car tout est vraiment très bien écrit et s’enchaîne parfaitement. Il faut beaucoup d’attention, de sang froid, de self control. Le plateau est extraordinaire, d’une grande gentillesse et grande bienveillance. J’apprends beaucoup en les regardant travailler une œuvre difficile tant sur le plan vocal que dramatique. Quant au chef Michael Schønwandt, c’est quelqu’un d’extraordinaire ; il a été vraiment à l’écoute des jeunes de l’Atelier qui participent à cette Lulu. C’est très important pour nous.

Propos recueillis par Alain Cochard, le 12 octobre 2011

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Berg : Lulu (version en 3 actes complétée par F. Cerha) Opéra Bastille
Les 28 octobre, 2 et 5 novembre 2011
www.operadeparis.fr

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