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Macbeth de Verdi à l’Opéra de Tours - Shakespearien en diable - Compte-rendu

Créé à Florence en 1847, Macbeth entame la relation musicale de Verdi avec le théâtre de Shakespeare. Cet opéra de jeunesse (que le maître italien remania pour les représentations parisiennes de 1865 au Théâtre-Lyrique), tout en respectant le cadre traditionnel, quitte le terrain du mélodrame héroïque pour pénétrer dans le tréfonds de la psychologie la plus noire.

Dans les décors de Nathalie Holt, la mise en scène exploite le caractère sombre et violent de la partition (apparition suggestive des sorcières au début de l’acte I, omniprésence de la mort symbolisée par un crâne, hallucinations et scène de la folie de Lady Macbeth ensanglantée au IV…). En homme de théâtre, Gilles Bouillon qui connaît son Shakespeare comme personne fait du couple le plus terrifiant de toute la littérature une incarnation d’une puissance cauchemardesque. Cette fièvre brûle aussi dans la fosse grâce à la direction dynamique, sans cesse en mouvement de Jean-Yves Ossonce à la tête de l’Orchestre Symphonique Région Centre-Tours qui sait mettre en lumière les différents climats avec une urgence qui ne se relâche pas.

Dans le rôle périlleux de Lady Macbeth, la soprano slovaque Jana Dolezilkova (photo) s’échauffe progressivement et entre aussi bien vocalement que scéniquement dans la peau de ce personnage monstrueux - la scène du somnambulisme fait froid dans le dos ! Le timbre, sans être idéal, répond à ce que voulait Verdi par la raucité de l’émission même si les aigus ne sont pas parfaits. A ses côtés, le Macbeth du baryton Enrico Marrucci, au style impeccable, manque un peu de personnalité ce qui, en définitive, fait de lui à juste titre un être influençable devenu, au nom du pouvoir, le jouet du Destin. Le ténor Luca Lombardo campe un Macduff de rêve, très chantant et d’une puissance vocale souple et contrôlée. Les autres rôles sont bien distribués, en particulier le Banco profond de la basse Jean Teitgen. Les Chœurs de l’Opéra de Tours participent avec ferveur au déroulement de la tragédie qui se joue sous leurs yeux.

L’homogénéité de cette représentation de Macbeth et sa cohérence d’ensemble confirment la qualité du travail réalisé par Jean-Yves Ossonce et son équipe, terminant en beauté la saison lyrique 2011/2012.

Michel Le Naour

Verdi : Macbeth - Tours, Grand Théâtre, 11 mai 2012

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Photo : François Berthon
 

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