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L’Orchestre-Atelier Ostinato à Gaveau - Nielsen honoré - Compte-rendu

Le programme était tentant, et le résultat est à la mesure de l’attente. L’Orchestre-Atelier Ostinato, constitué de jeunes instrumentistes (souvent Premiers Prix de conservatoire)  s’essayant en formation d’orchestre, s’attaque à Nielsen, le rare Concerto pour flûte, en compagnie de Grieg, Première Suite de Peer Gynt, et Tchaïkovski, Cinquième Symphonie. Des musiques du Nord, en quelque sorte. Le tout sous le patronage de l’Ambassade du Danemark et de deux fondations artistiques danoises, comme il se doit.
 
Le Concerto de Nielsen, daté de la fin de sa vie, créé à Paris en 1926, recèle des charmes inaccoutumés : par sa formule déjà, si peu fréquente pour flûte soliste dans le répertoire du XXe siècle ; et par son esprit, narratif mais pour voguer vers des territoires inattendus : piquants, allants, humoristiques ou glacés, avec des sautes d’humeur imprévisibles. On pourrait parfois penser à Stravinsky, sauf que la pâte reste irréductible. Irréductible à son auteur, il faut croire. Janne Thomsen, native elle aussi du Danemark, distille d’une flûte virtuose ses rythmes pointés et ses élégies tel un barde de légende. L’orchestre accompagne d’une douce brise ou de tempête, dans un juste climat d’aurores boréales.
 
Le même orchestre fait preuve d’une égale maîtrise dans la Suite de Grieg, avec des cordes voluptueuses. Mais c’est dans Tchaïkovski qu’il donne toute sa mesure, acerbe et homogène, dans tous les registres et pupitres. En phase avec la direction emportée d’une scrupuleuse précision par Jean-Luc Tingaud (photo). Jusque dans les subtilités : ainsi la fin du premier mouvement de la symphonie, aux timbres perdendo comme on les perçoit bien rarement. Ivry Gitlis, présent parmi le public, semble tout autant apprécier. Si les violoncelles manquent encore de corps, les progrès accomplis par cet orchestre de jeunes sont impressionnants. D’autant plus si l’on considère l’acoustique de la Salle Gaveau, d’une forte présence certes, mais qui ne pardonne rien. Tingaud, directeur artistique de la formation, et ses seconds pédagogiques, Richard Schmoucler, violon solo, et Vicens Prats, flûte solo, l’un et l’autre venus de l’Orchestre de Paris, peuvent à juste raison se sentir fiers des fruits récoltés.
 
Pierre-René Serna
 
Orchestre-Atelier Ostinato – Salle Gaveau, Paris, 6 décembre 2015

Photo © Jean-Baptiste Millot

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