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Le Vaisseau fantôme à Orange - Une vision d’un classicisme assumé - Compte-rendu

Une seule représentation au Théâtre antique pour ce Vaisseau fantôme qui fait souffler un vent nordique dans le ciel méditerranéen. Atmosphère lourde et sombre entretenue par un décor dominé par la gigantesque proue d’une épave inquiétante. Des vidéos statiques préparées par Marie-Jeanne Gauthé et projetées avec efficacité marquent les différentes étapes d’une action à la fois fantastique (la mer démontée, le port mystérieux) et domestique (l’intérieur de la maison où les fileuses attendent le retour des marins). Familier des lieux, Charles Roubaud maîtrise à la perfection l’immense plateau tant dans le face-à-face entre Senta et le Hollandais, ou de Senta avec Erik, que dans les scènes de foule animées et rythmées au cordeau.

A la tête de l’Orchestre Philharmonique de Radio France, Mikko Franck est le capitaine à bord. Rien n’échappe à sa direction d’une clarté lumineuse (chaque pupitre se détache avec une précision à laquelle on n’est pas toujours habitué à Orange), d’une tension habitée malgré une légère tendance à ralentir le tempo pour mieux épouser la subtilité de l’écriture wagnérienne. Quoiqu’il en soit, il réussit à donner de l’unité aux grands tableaux scéniques enchaînés avec une étonnante fluidité. Lyrisme et grandeur tragique sont au rendez-vous avec des chœurs engagés venus des Opéras d’Angers, d’Avignon, de Toulouse, auxquels il faut ajouter la Maîtrise d’Orange.

Le Hollandais d’Egils Silins (récemment entendu à Paris dans le rôle de Wotan), malgré sa prestance et le sentiment d’inquiétude qu’il génère lors de ses apparitions en redingote romantique, ne convainc pas toujours : trop contrôlé, manquant de couleurs et de puissance, il n’a pas l’étoffe d’un personnage blessé capable d’enthousiasmer Senta. Toute de blanc vêtue, Ann Petersen, voix souple aux aigus projetés avec aisance rend justice sans passion excessive à l’héroïne, mais avec une classe confondante. Les seconds rôles se révèlent très équilibrés : profond Stephen Milling en Daland, aisance de Steve Davislim en Pilote, solidité du Erik d’Endrik Wottrich, sens théâtral de Marie-Ange Todorovitch en Marie.

Somme toute, une représentation de belle facture galvanisée par la direction de Mikko Franck : une réussite qui laisse bien augurer de son premier mandat à la tête du Philhar.

Les Chorégies se préparent à présent pour deux représentations d’Un Bal Masqué – un ouvrage donné pour la première fois à Orange –, dans la mise en scène de Jean-Claude Auvray et sous baguette d’Alain Altinoglu.

Michel Le Naour

Wagner : Le Vaisseau Fantôme – Orange, Théâtre antique, 12 juillet 2013

Verdi : Un Bal Masqué
Les 3 et 6 août 2013- 21h 30
Orange- Théâtre antique

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Photo : Philippe Gromelle / Orange
 

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