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Le Quatuor Tana à la Seine Musicale – Promenade russe – Compte-rendu

A peine inaugurée, la Seine Musicale montre une grande variété dans sa programmation. Côté classique, de l’orchestre au piano solo (la série « Piano en Seine » débute ce 29 mai avec Menahem Pressler, de Seong-Jin Cho le 30 juin) les propositions se multiplient et le quatuor à cordes n'est pas oublié. Reste pour le mélomane à trouver ses habitudes dans ce nouveau lieu – et, accessoirement, à trouver plus facilement son chemin quand il émerge de la station Pont de Sèvres. La France et la signalisation, vaste sujet ...

Invité d’un week-end à dominante russe, le Quatuor Tana a pu montrer avec des ouvrages de Stravinski, Chostakovitch et Tchaïkovski que, contrairement à ce que d’aucuns imaginent, il ne se limite pas au répertoire contemporain, comme Antoine Maisonhaute, son premier violon, l’expliquait il y a peu dans nos colonnes. (1) Nul doute toutefois que sa fréquentation assidue prédispose la formation à saisir plus immédiatement que d'autres la modernité d’une partition telle que les Trois Pièces (1914) de Stravinski : les musiciens se régalent de la concision et du – prophétique – caractère répétitif de ces miniatures !

Cher au cœur des quatre instrumentistes, le 14ème Quatuor de Chostakovitch, n’est ni le plus spectaculaire, ni le plus populaire de son auteur. Une partition tardive (1973), sombre, sur laquelle plane la camarde (l’Opus 142 a été dédié à Sergueï Chirinsky, violoncelliste du Quatuor Beethoven, gravement malade et qui devait décéder en 1974), que les interprètes explorent d’une manière intense et sobre (le violoncelle de Jeanne Maisonhaute fait des merveilles). La menace de la mort pèse certes, mais aussi toute la solitude de Chostakovitch au soir sa vie ...

Placé après la pause, le 1er Quatuor de Tchaïkovski contraste singulièrement. Le naturel, la fraîcheur, l’élan des Tana rendent pleinement justice à cette partition de jeunesse, à ses saveurs venues de la musique populaire. On ne résite pas à la tendresse et à la poésie de l’Andante, finement distillé ; un morceau fameux pour avoir tiré des larmes à Tolstoï.

Quel dommage que cette belle et vivante interprétation fasse les frais, comme tout le reste du programme d’ailleurs, de la fort mauvaise idée qu’ont eue les techniciens de la Seine Musicale de poser un tapis de danse au sol - en prévision du spectacle à suivre – et d’y installer les musiciens.  L’acoustique du nouvel auditorium de l’Île Seguin pèche déjà par excès de matitude ; le défaut s'accentue évidemment dans de telles conditions. A éviter absolument - c’est en faisant qu’on apprend.

Prochains rendez-vous pour le quatuor à cordes à la Seine Musicale le 26 juin, avec les Hermès et les Mosaïques.

Alain Cochard

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(1) Lire l’interview : www.concertclassic.com/article/une-interview-du-quatuor-tana-des-racines-pour-des-horizons-nouveaux
 
Boulogne-Billancourt, Seine musicale, 20 mai 2017

Photo © Nicolas Draps

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