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Le Concerto Soave au Festival d'Ambronay - Feu expressif - Compte-rendu


Né de la rencontre entre le clavecin de Jean-Marc Aymes et le soprano de Maria-Cristina Kiehr (photo), l'ensemble Concerto Soave est vite devenu un stimulant atelier de re-créations baroques et, à ce titre, un familier des Festivals hautes époques. Ainsi au rendez-vous de l'édition 2011 d'Ambronay qui flirte aussi avec le contemporain (la Passion selon Marie du Libanais Zad Moultaka), figuraient ces Jardins de Galilée qui sans détour nous racontaient la belle histoire d'un dieu fait homme pour le salut du monde.

Au-delà, c'était aussi l'occasion pour nos interprètes de faire acte musicologique entre polyphonie et monodie, en insistant sur un cheminement qui bouleversa l'aventure des notes en Occident.

Chroniqueurs fidèles en l'occurrence, Jean-Marc Aymes et les siens ne se privent pas, chemin faisant, de revisiter aussi les oeuvres en poètes, attentifs au changement d'attitude des compositeurs du début du Seicento qui, dans le sillage des Académies florentines, humanisèrent le décor du sanctuaire en donnant une voix spécifique à Jésus, sa mère ou Marie-Madeleine et les apôtres. En d'autres termes, une Passion nouvelle manière s'éveille là, qui, dans une abbatiale archicomble, mettait en phase les mystères fondamentaux de la foi chrétienne avec quelques créateurs essentiels du XVIème siècle, tels Palestrina et Roland de Lassus pour l'Annonciation ; les mêmes étant ensuite associés au très inventif Romain Domenico Mazzocchi pour la Nativité, avant le dramatisme de la Crucifixion (l'énigmatique Sybilla Agrippa, toujours de Lassus, et le vrillant Crucifixus, «tombeau» tiré de la Selva monteverdienne de 1640).

Aussi bien, le divin Crémonais ne pouvait être écarté d'une telle affiche. Ainsi les motets à une et deux voix y brûlaient d'un feu expressif qui devait tout aux ardeurs du stile nuovo, cependant que la basse confortable de Stephan Mac Leod était en parfaite complicité avec la lumineuse musicalité de Maria-Cristina Kiehr. Et l'on terminait sur l'ivresse de la Résurrection avec un opulent Ascendit Christus du maître à prier Palestrina et surtout un captivant Confitebor alla francese, toujours demandé à la Selva monteverdienne. Une conclusion à la fois festive et orante où notre duo vocal rivalisait de ferveur et d'allégresse. On attend avec impatience de la même équipe d'autres parcours aussi réussis, d'autant qu'un concert instrumental sans faille donnait ici la réplique au chant (les violons d'Odile Edouard et Marie Rouquié), sous la conduite de Jean-Marc Aymes, tour à tour chef, claveciniste et organiste précis et ardent.

Roger Tellart

Festival d'Ambronay, Abbatiale, 25 Septembre 2011

Festival d’ Ambronay, jusqu’au 2 octobre 2011, rens. : www.ambronay.org

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Photo : DR

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