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La Passion selon Saint Jean par l’ensemble Aedes et Les Surprises à Sinfonia en Périgord – Sens du récit et expressivité - Compte-rendu

Saison du 10ème anniversaire d’Aedes, 2015-2016 aura été placée sous le signe de Bach pour l’ensemble vocal de Mathieu Romano qui, depuis l’automne dernier, fait équipe avec l’ensemble Les Surprises dans la Passion selon Saint Jean. On a plus d’une fois eu l’occasion de dire ici les mérites de deux formations parmi les plus talentueuses et dynamiques de la nouvelle génération baroque (et pas que baroque d’ailleurs, loin de là, s’agissant de l’éclectique chœur Aedes, autant à son aise chez Gesualdo que chez Poulenc !), mais jamais encore de saluer un travail en commun. La tournée qui les réunit est une première en effet, et une franche réussite dont le public du 26ème Festival Sinfonia en Périgord a été le témoin pour la huitième et dernière date de la tournée d’une Saint Jean mûrie au fil des mois et des diverses acoustiques (celle de la vaste église de la Cité à Périgueux n’aura pas été la plus confortable ...).
 

Mathieu Romano (de dos), Fernando Guimaraes (à dr.) © Romain Batteux / Sinfonia en Périgord

Un vingtaine de chanteurs, le même nombre d’instrumentistes : effectif relativement réduit que celui en présence, mais sous la direction d’un chef qui, on le comprend dès le chœur introductif, parvient à un remarquable relief dramatique par la vie intérieure qu’il imprime au texte musical. « Je veux que vous racontiez » demande souvent M. Romano à ses chanteurs en répétition. Et c’est bien de cela dont il question dans cette Saint Jean. Musique sacrée ? Certes, mais sans rien céder à l’effet, à l’extériorité, le jeune chef conçoit son interprétation avec un souci d’expressivité, en sens du récit qui tiennent l’auditeur en haleine face à une interprétation portée par une constante pulsation.

L’option peut surprendre des oreilles habituées à des approches plus déférentes, plus « amidonnées », s’agissant en particulier de l’Evangéliste. Mais il est tout cas bien difficile de résister à la manière dont l’étonnant Fernando Guimaraes aborde cet emploi. A ses côtés, le Jésus de Victor Sicard séduit par la richesse et la souplesse de son instrument, autant qu’une profonde humanité dans l’expression. Remarquée aussi la présence du ténor Enguerrand de Hys, styliste impeccable et émouvant dont la voix s’enrichit de beaux reflets cuivrés. L’alto bien timbré de Margot Oitzinger et le soprano souple et lumineux de Rachel Redmond sont à l’unisson d’une distribution aussi homogène qu’un ensemble Aedes en grande forme. On n’oublie pas, issu du chœur, Nicolas Brooymans, basse dont l’autorité naturelle et la couleur wagnérienne composent un Pilate saisissant, parfaitement accordé à l’optique défendue par Mathieu Romano.
 

Louis Noël Bestion de Cambulas (au premier plan), Nicolas Brooymans (au fond à dr.) © Romain Batteux/ Sinfonia en Périgord

Pour mener à bien ses choix, ce dernier peut en outre compter sur les instrumentistes des Surprises, exceptionnellement engagés. Mention spéciale pour un continuo très inventif où l’on retrouve entre autres Louis Noël Bestion de Camboulas, à l’orgue, et la gambiste Juliette Guignard, les co-fondateurs (en 2010) d’un ensemble qui mérite une fois de plus les éloges pour sa vraie identité sonore, autant que les qualités individuelles de ses membres. On a pu le constater, du côté des archets comme celui des vents, au cours d'une Saint Jean aussi singulière qu’intensément vécue.
Puissent Aedes et Les Surprises ne pas en rester là et vite se retrouver autour d’un nouveau projet.

Alain Cochard

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Périgueux, église de la Cité, 25 août 2016
NB : Quelques jours avant Sinfonia en Périgord, Mathieu Romano et son équipe on donné la Saint Jean dans le cadre des Rencontres de Vézelay, le 20 août. Retransmise par France Musique en direct cette soirée est disponible à la réécoute via : www.francemusique.fr/emission/le-concert-du-soir/2016-ete/rencontres-musicales-de-vezelay-2016-la-passion-selon-saint-jean-en-direct-le-20-aout-2016
 
Photo (de g. à dr : Victor Sicard, Mathieu Romano, Fernando Guimaraes)  © Romain Batteux / Sinfonia en Périgord
 
 
 
 
 
 
 

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