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​La musique à la Fondation Louis Vuitton – Transmettre, découvrir, vibrer

Depuis son inauguration en octobre 2014, l’étonnant et aérien bâtiment imaginé par Frank Gehry est devenu l’un des hauts lieux de l’art contemporain à Paris. Mais l’architecte américain ayant intégré un Auditorium (de 320 places environ) à son projet, la Fondation Louis Vuitton a pu aussi entrer dans les habitudes des mélomanes grâce une programmation de piano et de musique de chambre originale et qualitative. Une salle de concert de taille modeste, parfaitement adaptée entre autres aux jeunes artistes en début de carrière, voilà bien l’une des choses les plus utiles que l’on pouvait offrir à la vie musicale parisienne !
 
Il y a quelques jours, le récital de Lucas Debargue, lauréat remarqué du dernier Concours Tchaïkovski a fait l’événement.(1) Lundi 11 avril, Alexandre Kantorow (né en 1997, photo), autre splendide révélation récente du piano français, se produira dans un programme tout russe. Car si la Fondation Louis Vuitton accueille des célébrités telles que Lang Lang ou Maxime Vengerov, elle sait aussi découvrir, parier sur de nouveaux talents, se démarquer du conformisme réitératif d’autres saisons.
 
On doit à Antoine Manceau la programmation musicale d’une institution avec laquelle il collabore depuis son ouverture. Auparavant, il avait eu des activités très axées sur la transmission, d’abord à l’Académie d’Ambronay, auprès d’Alain Brunet, puis à Aix-en-Provence où Stéphane Lissner fit appel à lui en 2000 pour développer – avec le succès que l’on sait - l’Académie du Festival. Ouvert aux expériences nouvelles, A. Manceau effectua ensuite un passage par l’Académie Fratellini, avant de renouer avec la musique en tant que producteur et directeur artistique indépendant. Tout en poursuivant en parallèle une collaboration avec Olivier Mantei sur l’ambitieux projet de « La Belle Saison », il a donc aujourd’hui la responsabilité de la musique à la Fondation Louis Vuitton. C’est par l’intermédiaire de Laurent Bayle que Bernard Arnaud et son épouse, la pianiste Hélène Mercier, l’ont sollicité pour, précise-t-il, « bâtir avec eux une programmation fruit d’une réflexion musicale conjointe. »
 
« La volonté n’est pas de travailler sur une saison classique, annoncée des mois à l’avance, explique A. Manceau, mais de penser l’activité musicale de la Fondation de manière très vivante, de faire vivre la Fondation par la musique, en ne se privant pas d’organiser sur le tard des événements en relation avec les expositions. » Ainsi, alors que celle consacrée aux artistes chinois s’est ouverte le 28 janvier, c’est assez récemment qu’un récital de Yundi Li est venu s’inscrire dans le calendrier de l’Auditorium à la date du 17 juin.
 
Antoine Manceau © Alexandre de Cadoudal
 
Détail révélateur, parmi les trois axes de sa programmation, A. Manceau mentionne en premier lieu la transmission. Chaque mois, la Fondation accueille (sur des périodes de 3 ou 4 jours) des masterclasses. Celles de Gautier Capuçon réunissent six fois dans la saison un groupe de six jeunes violoncellistes (recrutés pour l’ensemble de la saison). « Des rendez-vous très suivis, qui fidélisent un public multi-générationnel », se félicite A. Manceau.
La Fondation organise par ailleurs des masterclasses en collaboration avec la Chapelle Musicale Reine Elisabeth de Bruxelles. Après Augustin Dumay la saison passée, le chant fera son entrée en beauté du 22 au 24 avril, avec José van Dam et six jeunes chanteurs.
Quant aux dernières mastesclasses de piano, elles se sont déroulées en février dernier, avec la Fondation Lang Lang. Une expérience pédagogique originale puisque les jeunes musiciens étaient guidés par le médiatique virtuose chinois, mais aussi par son ancien professeur, Gary Graffman.
 
Deuxième axe de la programmation, la mise en lumière de jeunes artistes s’effectue dans le cadre de la série « Piano Nouvelle Génération ». Certains d’entre eux ne sont certes déjà plus des inconnus, tels Kit Amstrong, Benjamin Grosvenor ou Jan Lisiecki, mais on avait encore peu entendu à Paris Jean-Paul Gasparian et Lucas Debargue et il s’agira bientôt du tout premier récital d’Alexandre Kantorow dans la capitale.
 
Enfin, la Fondation ne se prive évidemment pas du plaisir d’accueillir des concerts événements. Après Maxime Vengerov en février, le violon sera a nouveau – royalement ! - servi avec Tedi Papavrami en juin dans un époustouflant programme Paganini/Ysaÿe. On n’hésitera pas non plus à qualifier d’événement, la masterclasse que Seiji Ozawa donne le 16 avril avec les jeunes musiciens de son Academy Switzerland. Un moment d’autant plus attendu qu’il marque l’unique apparition du maestro japonais à Paris au cours de l’année de son 80e anniversaire.
 
A. Manceau est plongé dans la préparation de la saison 2016-2017. Après les deux premières, essentiellement dédiées au piano et à la musique de chambre, la prochaine comprendra quelques concerts avec des orchestres de chambre – dans du répertoire classique, adapté à l’acoustique de la salle. Quasi absente jusqu’ici, la musique contemporaine va aussi faire son apparition avec deux créations, dont une en lien avec l’exposition du moment.
Après la Chine, la Fondation consacre une grande exposition à la Russie l’an prochain. Côté musique, son répertoire sera gâté, « avec un axe Scriabine important », glisse A. Manceau. On guettera aussi la résidence de quatre jours confiée à Pierre-Laurent Aimard autour de la thématique du choc des avant-gardes au début du XXe siècle. Un choix idoine dans un lieu d’abord synonyme de modernité.
 
Alain Cochard
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(1) http://www.concertclassic.com/article/lucas-debargue-en-recital-lauditorium-de-la-fondation-louis-vuitton-intelligence-pianistique
 
Alexandre Kantorow, piano
Œuvres de Tchaïkovski, Rachmaninov, Stravinsky, Balakirev
11 avril 2016 – 20h
Paris – Fondation Louis Vuitton
www.fondationlouisvuitton.fr/concert-d-alexandre-kantorow.html

Photo Alexandre Kantorow © Vincent Bourre

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