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La Chatte métamorphosée en femme d’Offenbach – Miaou ! – Compte-rendu

Il y a du un-acte dans l’air en Offenbachie ! Tandis que la Péniche Opéra se lance avec succès dans une intégrale des ouvrages de cette catégorie, l’Auditorium d’Orsay vient de programmer La Chatte métamorphosée en femme, peu avant le démarrage de l’exposition Gustave Doré au musée. Doré-Offenbach, l’association allait de soi : le premier est connu pour ses illustrations des Fables de La Fontaine ; le musicien a puisé chez ce dernier la matière d'une opérette conçue sur un livret de Scribe et Mélesville.
Créée en 1858 (quelques mois avant Orphée aux enfers), La Chatte métamorphosée en femme présente un caractère pour le moins étonnant. La bouffonnerie et le piquant ne lui font pas défaut, mais on y trouve aussi de la mélancolie, de la noirceur même, des ombres, des ambiguïtés. Bref, un musicien différent de l’idée par trop univoque qu’on s’en fait parfois.

Dans une scénographie aussi sobre qu’efficace, et avec la complicité d’Anne Vaglio (lumières), Alexandra Lacroix a imaginé une mise scène sans chichis tirant pleinement parti du matériau dont elle dispose (d’une petite heure, l’ouvrage a été augmenté de quelques extraits bien choisis de La Chanson de Fortunio, du Voyage dans la lune, Geneviève de Brabant et Pomme d’Api).

Quatuor vocal parfaitement distribué. Magali Léger possède la voix, le physique et le tempérament idoines pour incarner une Minette d’un charme fou. Parfait Fritz dans La Grande Duchesse des Brigands en fin d’année passée, François Rougier campe avec tact un Guido misanthrope, taciturne et attachant. Le Dig Dig de Guillaume Andrieux ne passe pas inaperçu : prototype de l’artiste complet, ce beau baryton se double d’un excellent acrobate – et se révèle aussi bon chanteur la tête en haut qu’en bas ! On guettera son Aben Hamet dans l’ouvrage éponyme de Dubois, mi-mars à Tourcoing, scène où il débutera en Pelléas la saison prochaine. La mezzo Pauline Sabatier (Marianne) sait faire évoluer avec intelligence son personnage ; d’abord vieille fille revêche, elle l’éclaire peu à peu en prévision de l’heureuse conclusion d’un ouvrage que la danseuse Francesca Bonato (la chatte) anime de sa féline présence.

Thibaud Perrine s’est chargé avec l’art qu’on lui connaît de l’arrangement de la partie d’orchestre pour 16 instrumentistes. Les musiciens de l’Orchestre Pelléas, installés côté jardin au pied de la scène, se régalent, rondement menés par un Benjamin Lévy aussi attentif au plateau qu’aux coloris subtils de cet Offenbach atypique.

La production d’Alexandra Lacroix a toutes les qualités pour « tourner » facilement. Puisse-t-elle continuer des faires des heureux sur d’autres scènes !

Alain Cochard

Offenbach : La Chatte métamorphosée en femme – Paris, Auditorium du musée d’Orsay, 4 février 2014

Photo © Sophie Boegly

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