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Geneviève de Brabant d’Offenbach par Carlos Wagner à l’Opéra de Montpellier – Deux en une

Carlos Wagner

Carlos Wagner (photo) invité de Valérie Chevalier pour sa première saison à l’Opéra national de Montpellier ? La chose n’étonne guère quand l’on sait les liens tissés depuis une bonne décennie maintenant entre le metteur en scène et la directrice générale de l’institution languedocienne. V. Chevalier a beaucoup travaillé avec l’artiste d’origine vénézuélienne à l’époque où elle était directrice de l’administration artistique l’Opéra national de Lorraine, au côté de Laurent Spielman. Le succès d’Une Tragédie florentine de Zemlinsky en 2006 scella une relation de confiance qui s’est poursuivie, toujours à Nancy, avec Les Neveux du Capitaine Grant, zarzuela de Caballero, La Vie parisienne, Carmen et The Rake’s Progress.
 
Avec Geneviève de Brabant, Carlos Wagner s’attaque à un Offenbach aussi déjanté que rare sur les scènes. Hormis une production joliment troussée – et allumée ! - des Brigands (version 1867), les occasions de découvrir l’ouvrage n’ont pas été nombreuses ces dernières années. Une partition ? Trois en fait car, à la version originale en 2 actes de l’opéra bouffe, créée aux Bouffes-Parisiens en 1859, succédèrent d’abord une version en 3 actes donnée au théâtre des Menus-Plaisirs en 1867, puis une en cinq actes, un « opéra-féerie » que le théâtre de la Gaîté entendit en 1875. « Je voulais au départ utiliser la version en 3 actes, explique C. Wagner, mais en me penchant sur la version de 1859, j’ai découvert qu’elle comporte des idées, des numéros musicaux très amusants que je trouvais vraiment trop dommage de ne pas utiliser. »
 
 

Carlos Wagner (en bas à dr.) pendant les répétitions de Geneviève de Brabant © DR

L’idée d’un « mix » des versions 1859 et 1867 a donc germé dans l’esprit de celui qui, après avoir reçu le feu vert de V. Chevalier, s’est mis au travail. « J’ai choisi les numéros musicaux les plus importants des deux versions, les plus fous, le plus décalés, mais il a fallu ensuite « ajuster » le livret car, selon la version, les histoires sont assez différentes. Avec mon assistant Benjamin Prins, nous avons essayé de garder le fil rouge d’Offenbach tout en joignant les deux versions. Nous avons recherché un humour plus proche du public d’aujourd’hui. »
« Autre point important : bien que l’ouvrage s’intitule Geneviève de Brabant, le rôle de ce personnage est très réduit. Le personnage le plus fou, le plus charismatique est Sifroy, mari de Geneviève, mais son épouse est plutôt pâle. J’ai voulu la mettre en valeur en inventant une petite histoire : l’existence d’un enfant caché. Dans la version originale de 1859, Isoline, la femme de Golo, le « méchant » de l’histoire, loue un enfant et fait croire à son mari qu’il est de lui - chantage émotionnel pour regagner son amour. Nous avons imaginé que cet enfant est de Geneviève qui, ayant donné naissance à un héritier, peut donc être couronnée à la fin de l’œuvre. Nous avons certes pris là une liberté artistique, mais il me semble que ça fonctionne très bien. »
 
Une joyeuse ambiance règne en tout cas durant les répétitions d’un Offenbach pour lequel Carlos Wagner retrouve le décorateur Rifail Adjarpasic, avec lequel il a beaucoup travaillé à Nancy - « un collaborateur, un co-créateur que j’apprécie beaucoup » - mais aussi Fabrice Kebour (lumières), autre complice rencontré à l’Opéra de Lorraine. Aux costumes, la collaboration avec Fabrice Ouvrard est une première en revanche et ravit à l’évidence un metteur en scène qui découvre pratiquement la totalité de la distribution assemblée par V. Chevalier, hormis Sophie Angebault (elle tient les rôles de Brigitte, Christine et Eglantine) qui incarnait la baronne suédoise dans la Vie parisienne à Nancy. Jodie Devos, Avi Klemberg, Jean-Marc Bihour, Diana Higbee, Valentine Lemercier, Sébastien Parotte, Kevin Amiel, Thomas Morris, Enguerrand de Hys, Philippe Ermelier : « ce sont tous de superbes comédiens, s’enthousiasme Carlos Wagner. La comédie est une discipline très dure, il y a des chanteurs qui ne la possèdent pas et il est très difficile de travailler avec eux. Mais pour cette Geneviève de Brabant je dispose d’une équipe qui a tout de suite compris le style d’humour que je souhaite faire passer dans ma mise en scène ; c’est un pur bonheur ! »
 
Avec Claude Schnitzler à la baguette, un fin connaisseur de ce répertoire, toutes les conditions sont réunies pour que l’elixir offenbachien exerce ses revigorants effets. Trois dates seulement, ne les manquez surtout pas !
 
Alain Cochard
(Entretien avec Carlos Wagner réalisé le 3 mars 2016)

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Offenbach : Geneviève de Brabant
16, 18 et 20 mars 2016
Opéra Berlioz – Le Corum
www.concertclassic.com/concert/genevieve-de-brabant
 
Conférence de Jean-Christophe Keck, le 15 mars à 18h 30 (Salle Molière)

Photo © DR

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