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Festival des heures des Bernardins – Grâce matinale – Compte-rendu

La cinquième édition du Festival des Heures, qui scande en musique les heures canoniales, de matines à complies, s’ouvrait cette année avec les Vêpres de Rachmaninov, dont la composition renvoie à l’office nocturne, du milieu de la nuit au lever du jour.
Il faut talent et courage pour s’attaquer à un tel monument de la musique sacrée russe, qui repose sur des traditions chorales bien spécifiques, avec notamment le rôle dévolu aux basses. Les chanteurs de La Tempête (photo), l’ensemble fondé et dirigé par Simon-Pierre Bestion, en donnent une interprétation remarquable, toujours soucieuse de clarté et d’équilibre, par exemple dans la très belle berceuse du Nunc dimittis.

Pour cette version de concert, Simon-Pierre Bestion a imaginé une dramaturgie musicale qui permet d’apprécier la couleur de chacun des chants et en a pour cela modifié l’ordre d’exécution. Chaque pièce devient ainsi, au gré des entrées des différentes voix, une scène, un tableau vivant qui souligne à la fois le propos des textes liturgiques et l’atmosphère propre à la musique, comme dans le sixième chant, Réjouis-toi, Vierge, où les chanteurs, d’abord allongés, penchés les uns sur les autres, se redressent peu à peu pour adresser leur chant de louange et de consolation. Un bel exemple de sécularisation d’une musique sacrée.
 

Dominque et Tanguy de Williencourt © Diaz

Au long de la journée se poursuivra cet aller-retour entre sacré et profane, avec dès midi (concert « des laudes »), un dialogue de Dominique de Williencourt (violoncelle) avec son neveu, le pianiste Tanguy de Williencourt. Au Kol Nidrei de Max Bruch succède, dans une transcription réussie, le Prélude de L’Enfant prodigue de Debussy. Les deux musiciens y montrent une belle complicité et le jeune pianiste affirme un sens du timbre (dans Debussy) autant que du rythme (dans le scherzo de la Troisième Sonate de Beethoven). Son interprétation de Franz Liszt (Bénédiction de Dieu dans la solitude) a laissé le public en état de grâce.
 
Jean-Guillaume Lebrun

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Paris, Collège des Bernardins, 19 novembre 2016
 
Photo La Tempête © Richard Baltauss

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