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Compte-rendu - Récital Thomas Oliemans/Malcolm Martineau - Fauré et Poulenc chez eux à l'Institut néerlandais


Depuis la grande Elly Ameling qui avait travaillé à Paris après la guerre avec le premier grand interprète de Francis Poulenc le baryton Pierre Bernac, nombre de chanteurs hollandais entretiennent un rapport privilégié avec le répertoire français. Cela s'est vérifié une fois de plus et de la plus éloquente façon lors du récital Fauré/Poulenc organisé par l'Institut culturel néerlandais. Les vedettes en furent le jeune baryton Thomas Oliemans et le pianiste écossais Malcolm Martineau, remarquable accompagnateur.

A 31 ans, Thomas Oliemans n'est pas un inconnu. D'abord, il a remporté en 2002 le Prix Pierre Bernac de l'Académie internationale de Musique Maurice Ravel à Saint-Jean-de-Luz. Il s'est également produit à l'opéra dans des oeuvres de Henze, Britten, Verdi, Puccini, Rameau ou en Papageno dans La Flûte enchantée de Mozart au Capitole de Toulouse notamment. Et cela s'entend : ça n'est pas une petite voix ! Il aborde la mélodie française avec tous ses moyens. Et c'est ainsi qu'on lui rend justice. Voix longue et égale, timbre riche qui contient à la fois Pelléas dans le raffinement du haut medium et Golaud dans un grave facile et sonore.

Mais là n'est pas l'essentiel. La clef pour pénétrer les secrets du chant français reste d'abord l'art de dire. Thomas Oliemans a merveilleusement compris que la projection du mot était la condition de l'interprétation correcte de la musique. Comme l'humour ne lui est pas étranger et que son expérience de la scène n'est pas petite, il se révèle grand récitaliste. Le symbolisme du Fauré de L'horizon chimérique comme des Mirages lui réussit parfaitement. Mais cela pose moins de problème à un non francophone que le style si contrasté, à la fois très élaboré et très proche de la veine populaire de Poulenc. Ce fut un régal qu'on pourra prolonger bientôt avec son nouveau CD(1) gravé avec le même pianiste.

C'est que la prosodie française ne pose aucun problème à Thomas Oliemans très à l'aise dans notre langue. Il y a toute la santé tourangelle dans les Chansons villageoises avec pourtant de la tragédie et du sarcastique. Alternent joliment le moine et le frippon au gré des textes de Paul Eluard, Max Jacob, Maurice Fombeure. Tout a passé si vite qu'il faut encore un bis très parisien où Poulenc se fait « montparno » avec Apollinaire. Ne faisons pas l'erreur d'enfermer Thomas Oliemans dans un seul répertoire, car on reparlera de ce jeune chanteur à l'évident appétit musical. Il a une voix, mais aussi une cervelle. Cela compte dans une carrière...

Jacques Doucelin

(1) Mirage KTC 1366

Paris, Institut culturel néerlandais, le 6 mai 2009

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Photo : DR

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