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Compte-rendu - Le Quatuor Belcea aux Bouffes du Nord - Conversation élevée


L’acoustique rêvée des Bouffes du Nord est un écrin parfait pour la musique de chambre qui prend ici toute sa dimension, favorisant la clarté des plans sonores mais n’autorisant en revanche aucune imperfection instrumentale. Rien à craindre à cet égard avec le Quatuor Belcea – un ensemble constitué en 1994 à Londres – moins connu que d’autres formations du même âge mais d’une intensité de jeu qui allie la pureté du discours à un dynamisme maîtrisé. Chaque musicien (les violonistes Corina Belcea et Laura Samuel, l’altiste Krzysztof Chorzelski et le violoncelliste Antoine Lederlin), tout en conservant sa personnalité, réussit à se fondre dans un tout homogène. La conversation musicale y est sans cesse au service du sens dramatique et d’une respiration juste.

Les deux pages majeures du répertoire qu’ils interprètent (Quatuor n°14 « La Jeune Fille et la Mort » D. 810 de Schubert et Quatuor n°8 op 59 n°2 « Razumovski » de Beethoven), outre une plénitude virtuose, possèdent une qualité de chant (Andante con moto du Quatuor de Schubert) et une énergie contagieuse (les mouvements extrêmes du Beethoven) qui créent des climats tour à tour exaltés, poétiques, nerveux, adaptés à la magie du lieu. Le bis (final Larghetto espressivo – Allegretto agitato du Quatuor n°11 en fa mineur op 95 de Beethoven) est de la même veine par le fini irréprochable et l’énergie virile de la conception. Fin connaisseur, le violoncelliste Alain Meunier, présent dans la salle, a des yeux de Chimène pour cette exécution si aboutie et d’une si noble hauteur de vue. Elle place indéniablement le Quatuor Belcea parmi les formations les plus exemplaires du moment.

Michel Le Naour

Paris, Théâtre des Bouffes du Nord, 8 juin 2009

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Photo : DR

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