Violon solo du Philharmonique de Radio France depuis 2005, Svetlin Roussev aime à se produire en concerto ou en musique de chambre, pour le bonheur du mélomane qui prend ainsi toute la mesure d’un poète de l’archet à la sonorité riche et chaleureuse chez qui le souci de l’expression domine toujours. Roussev, qui vient de signer un bel enregistrement de la Sonate op 45 de Grieg et de la 3ème Sonate «Epique » de Nikolaï Medtner avec le pianiste Frédéric D’Oria-Nicolas (1), s’est produit avec son partenaire à Gaveau dans un programme composé de ces deux œuvres, précédées de la Sonate KV 379 de Mozart.

Le programme eût sans doute été un peu court sans cette dernière, mais elle paraissait toutefois presque superflue compte tenu de la densité de ce qui allait suivre. Après cette tendre et lyrique entrée en matière, le duo attaque la Sonate en ut mineur de Grieg avec toute l’ardeur farouche que réclame l’Allegro molto ed appassionata initial. La tenue de la ligne, la justesse des coloris font également mouche dans l’Allegretto central, confidence poétique sincère et dénuée de sentimentalisme facile, aussi bien que dans un finale dont les interprètes libèrent la débordante vitalité en préservant la respiration et la dimension narrative du morceau. Leur simplicité sonne « vrai » et sied on ne peut mieux au naturel et à la fraîcheur du Norvégien.

La Sonate n°3 en mi mineur « Epique » de Medtner (1880-1951) aura pu surprendre certains auditeurs par ses impressionnantes dimensions (quatre mouvements ; plus de quarante-cinq minutes !). Il vrai que, même si le disque a pas mal contribué depuis quelques années à documenter la production du compositeur russe, ses ouvrages demeurent bien trop rares au concert. On ne peut que se féliciter de voir des artistes tels que Roussev et D’Oria-Nicolas s’intéresser à la Sonate op 57, mais plus encore investir avec autant d’à-propos une œuvre tardive (1938) et exigeante, véritable épopée musique musicale dont la « russité » témoigne de la conversion de l’exilé à la religion orthodoxe. Ferveur, noblesse : les interprètes guident l’auditeur avec beaucoup de sûreté dans une écriture complexe mais d’une envoûtante profusion mélodique. Il est toujours agréable qu’un concert vienne confirmer la réussite d’un enregistrement... Maintenant, pensez aux Sonates n°1 et 2 et aux Nocturnes op 16, a-t-on envie de lancer aux deux musiciens.

Alain Cochard

Paris, salle Gaveau, 7 octobre 2009 (1) 1 CD Fondamenta Pour en savoir plus sur Nikolaï Medtner, on consultera avec profit le site de la Medtner Society (en anglais uniquement) : www.medtner.org.uk

Programme de la Salle Gaveau

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