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Adrien La Marca et Thomas Hoppe en récital à Gaveau – Un idéal chambriste – Compte-rendu

Pensiero & Allegro appassionato ; plénitude du lyrisme, franchise, intelligence du dialogue : le diptyque de Frank Bridge par l’altiste Adrien La Marca (photo) et le pianiste allemand Thomas Hoppe a valeur d’exergue à l’orée du récital que ces artistes donnent à Gaveau à l’occasion de la parution d’un splendide disque de musique anglaise (1).
Suit la fameuse Sonate « Arpeggione », que l’on a plus souvent coutume d’entendre au violoncelle mais qui s’accommode parfaitement d’une interprétation à l’alto, a fortiori quand elle est conduite avec ce sens de la ligne et cet art du chant. Les qualités d’un des meilleurs archets français de la nouvelle génération étaient déjà connues, le concert aura toutefois révélé au public parisien un pianiste de très grande classe et un duo dont l’entente nous vaut un Schubert au parfum très viennois, d’un charme et d’une vivacité irrésistibles.
 
 

Adrien la Marca & Thomas Hoppe © Bernard Martinez

Même respiration commune dans les Märchenbilder schumaniens. L’archet de La Marca peut être le plus beau et le plus émouvant des chanteurs, mais il sait parler aussi. La diversité de l’expression, la justesse de coloris parfaitement accordés à l’univers troublant du dernier Schumann servent les caractères de chacun des quatre morceaux. L’art de la narration à l’œuvre ici, la qualité d'écoute réciproque sont tels que l’auditoire retient son souffle ; les portes du rêve s’ouvrent en grand...
 
Music for a while de Purcell (arrangé par M. Tippet) fournit une transition idéale, toute de simplicité et pureté, vers la Sonate pour alto et piano de Rebecca Clarke (1886-1979). L’altiste et compositrice anglaise avait 33 ans lorsqu’elle signa cet authentique chef-d’œuvre. Quelques influences (Ravel, Debussy) ? Sans doute, mais d’abord un ouvrage totalement abouti et foisonnant pour lequel Adrien La Marca nourrit une vraie passion depuis longtemps (2). Il est chez lui dans cette musique et, porté par le piano complice de Hoppe, en livre une interprétation pleine de sève et de relief, de couleurs et d’émerveillement, parvenant une fois de plus avec son partenaire à une forme d’idéal chambriste.
 
Prokofiev (un tonique Mercutio tiré de Roméo et Juliette) et Fauré (tendre et vibrant Après un rêve) concluent une soirée que l’on quitte impatient de vite retrouver le duo La Marca-Hoppe.
 
Alain Cochard

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(1) Œuvres de Clarke, Dowland, Britten, Bridge, Harvey, Vaughan Williams, Purcell ; Adrien La Marca, alto / Thomas Hoppe, piano (La Dolce Volta LDV 22 / dist. Harmonia Mundi)
 
(2) Lire l’interview d’Adrien La Marca : http://www.concertclassic.com/article/trois-questions-adrien-la-marca-un-nouveau-heros-de-lalto

Paris, Salle Gaveau, 17 février 2016

Photo © Bernard Martinez

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